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"Elle se dit qu’elle a échappé au pire": l’avocate de Sandrine Josso appelle Joël Guerriau à la "dignité"

L’avocate de la députée Sandrine Josso, qui accuse le sénateur Joël Guerriau de l’avoir droguée, réclame de la "dignité" à l’élu mis en examen dans sa défense, ce mardi dans "Apolline Matin" sur RMC.

Une députée droguée par un sénateur. Joël Guerriau a été mis en examen pour "administration d'une substance de nature à altérer son discernement ou le contrôle de ses actes afin de commettre un viol ou une agression sexuelle", ainsi que "détention et usage de substances classées comme stupéfiants", et placé sous contrôle judiciaire avec interdiction d'entrer en contact avec la plaignante, Sandrine Josso, qui a confié ce lundi soir "avoir cru mourir". Pour son avocate, Julia Minkowski, "son sentiment aujourd’hui, c’est de se dire qu’elle a échappé au pire".

"Sandrine Josso se remet progressivement, physiquement, de ce qui lui est arrivé, explique-t-elle dans Apolline Matin ce mardi sur RMC et RMC Story. Elle a continué à avoir des symptômes de cette ingestion de drogue à son insu dans les jours qui ont suivi. Elle va mieux, de ce point de vue. Psychologiquement, elle se sent extrêmement vulnérable. Je crois qu’elle est vraiment en état de choc post-traumatique. Elle se demande comment elle va gérer l’avenir, puisque c’est une femme très forte qui n’a pas d’habitude ce sentiment de vulnérabilité. Et elle est extrêmement déterminée à faire de cette agression un combat pour dénoncer ce fléau. L’ingestion de drogue à son insu, on y fait souvent référence dans les bars, les boites de nuit, mais moins dans ces cas de soumission chimique où c’est un proche, à votre propre domicile…"

"Elle s’est enfuie de ce guet-apens, raconte Me Julia Minkowski. Elle avait un malaise très important, des palpitations, des sueurs, des nausées… Elle a pu comprendre, par le comportement extrêmement bizarre du sénateur Joël Guerriau, mais aussi parce qu’elle l’a vu manipuler un sachet en plastique, qu’il était en train de la droguer. Elle n’a eu plus qu’une seule idée, c’était s’enfuir de cet endroit. Il l’a suivie dans l’ascenseur, jusqu’à son taxi. Elle lui a dit ‘je dois partir, je dois aller à l’Assemblée’. Elle ne voulait rien montrer surtout de son malaise, de peur qu’il lui propose d’aller s’allonger ou un verre d’eau. Elle ne voulait plus rien boire. Il fallait qu’elle parte. Son sentiment aujourd’hui, c’est de se dire qu’elle a échappé au pire. Elle en subit des conséquences psychologiques très fortes et elle a une pensée pour tous ceux qui n’ont pas eu sa chance."

Témoin RMC : Me Julia Minkowski - 21/11
Témoin RMC : Me Julia Minkowski - 21/11
9:04

"La thèse de l’erreur de manipulation me parait complètement tirée par les cheveux"

Pour se défendre, Joël Guerriau plaide l’erreur de manipulation. "Joël Guerriau considère qu’elle n’a pas pu voir de sachet. Pourtant, c’est bien dans le tiroir de la cuisine que Sandrine Josso avait désigné aux enquêteurs que, lors de la perquisition, ils ont trouvé le sachet, souligne l’avocate de la députée de Loire-Atlantique. Chacun a le droit de se défendre comme il veut. Joël Guerriau doit évidemment se défendre. Mais accuser Sandrine Josso de mensonge sur un point précis qui est objectivement vérifié par le dossier, je vous avoue que là, je suis dans une certaine perplexité. La thèse de l’erreur de manipulation me parait complètement tirée par les cheveux. C’est très grave, vous détenez une drogue dure chez vous, aussi forte que de la MDMA, de l’ecstasy en poudre. Une de vos amies, depuis dix ans, en ingère à son insu. C’est d’une gravité qui réclame une dignité, une responsabilité, y compris dans la façon dont il se défend. L’accuser de mensonge sur un point objectivité vérifiable, je ne comprends pas cette attitude."

"A l’heure de la lutte contre les violences sexuelles, les notions de consentement et de discernement sont des pierres angulaires, ajoute Me Julia Minkowski. Droguer quelqu’un à son insu, c’est abolir son libre arbitre, c’est porter atteinte au fondement même de la liberté de chacun de consentir ou non à un acte sexuel. Joël Guerriau dit ‘je savais que c’était un euphorisant, mais je ne savais pas que c’était de la MDMA’. Mais un euphorisant, qu’est-ce que vous pensez que ça peut être à part de la drogue? C’est une infraction extrêmement grave que de donner ce type de drogue à l’insu d’une personne, à l’heure où on incite au respect absolu du discernement."

Selon l’avocate de Sandrine Josso, Joël Guerriau s’est excusé. "Mais à mon sens, ses excuses ne sont pas totales à partir du moment où il se déresponsabilise lui-même, explique Me Julia Minkowski. Il ne savait pas que c’était de la drogue, il l’avait mise dans un verre la veille qu’il n’avait pris, donc ce n’était pas volontaire… Comme par hasard, c’est ce verre-là qu’il a retiré du placard quand Sandrine Josso était là. Comme par hasard, il avait oublié qu’il avait mis de la poudre. Comme par hasard, c’est ce verre-là qui a été servi à Sandrine Josso. Je voudrais saluer l’attitude de Sandrine Josso, qui est une femme très courageuse, et les réflexes qu’elle a eus. Elle veut que les gens soient alertés. C’est terrible. Il faut connaitre ces infractions qui peuvent être faites dans un cadre intime. Elle a réussi à s’enfuir. Elle s’est confiée immédiatement au chauffeur de taxi, qui a eu une attitude exceptionnelle et qui malheureusement, comme il a l’habitude, lui a dit ‘oui Madame, vous avez l’air d’avoir été droguée’. Elle a été prise en charge par ses collègues à l’Assemblée, puis elle est allée à l’hôpital. Elle a fait des prélèvements. Elle est allée porter plainte. Tout ça, ça montre l’importance de la réaction quand vous êtes victime d’une agression. C’est ce qu’on doit retenir de cette affaire."

LP